Le chaos urbanistique à Alger : quand le R+5 devient R+10
5/8/20242 min read


Alger, autrefois considérée comme l’une des perles de la Méditerranée, se retrouve aujourd’hui prisonnière d’un désordre urbanistique qui mine son identité et sa qualité de vie. Le phénomène le plus frappant reste cette pratique devenue monnaie courante : transformer un simple R+5 autorisé en un R+10 déguisé, sous couvert de légalité.
Une faille réglementaire exploitée à outrance
Le stratagème est connu de tous les acteurs du secteur. En l’absence persistante de Plans d’Occupation des Sols (POS) dans de nombreuses communes, les commissions d’urbanisme se réfèrent au Plan Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme (PDAU). Or, ce dernier, plus général et moins précis, laisse une marge de manœuvre que les promoteurs n’hésitent pas à exploiter.
Ainsi, là où un permis de construire devrait encadrer strictement une hauteur de cinq étages, certains obtiennent « légalement » des autorisations qui leur permettent, par le biais de mezzanines, d’entresols ou d’attiques, de monter jusqu’à dix étages. Le tout validé par des commissions locales souvent trop permissives, parfois même soupçonnées de complicité active.
Le fait accompli comme stratégie
Une fois les immeubles construits, les autorités locales et les wilayas se retrouvent face à une situation irréversible. Détruire un bâtiment « légalement autorisé » est politiquement et financièrement quasi impossible. Les quelques responsables qui ont tenté d’imposer des démolitions ont vite reculé, confrontés à la fois à la puissance financière des promoteurs et à l’incompréhension des habitants eux-mêmes, qui jugent à juste titre que l’État aurait dû intervenir en amont, et non après coup.
C’est ce jeu du fait accompli qui alimente l’anarchie actuelle : les chantiers surgissent à une vitesse fulgurante, modifiant brutalement le visage de quartiers entiers. Ce qui devrait être des espaces résidentiels harmonieux se transforme en forêts de béton sans logique urbanistique, avec des infrastructures publiques incapables de suivre.
Un cercle vicieux destructeur
Les conséquences de cette dérive sont multiples :
Saturation des réseaux routiers et d’assainissement, conçus initialement pour accueillir des zones pavillonnaires et non des tours massives.
Perte de valeur immobilière pour les riverains, qui voient leur cadre de vie se détériorer et leurs biens perdre en attractivité.
Montée des tensions sociales, car derrière chaque tour érigée se cache la colère de dizaines de familles impactées par le bruit, le manque de stationnement, la perte de lumière naturelle.
En s’abritant derrière la légalité formelle, les promoteurs imposent une illégalité urbanistique qui défigure Alger. Et tant que les POS ne seront pas généralisés, les failles du système continueront d’être exploitées sans vergogne.
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